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Petits groupes, grands groupes

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Dans de nombreux centres de vacances, les enfants sont répartis en petits groupes et en grands groupes. Cette organisation devenue souvent conventionnelle est-elle essentiellement pratique ? A-t-elle des objectifs pédagogiques ? Considérée en fonction des individus qui la composent avec la richesse de leurs différences, est-elle représentative d’une conception des vacances collectives ?

Cette structure de vie collective recouvre trois types de situations qui alternent et que les enfants vivent au fil de la journée. Le petit groupe est constitué de quelques enfants du même âge avec un animateur référent, pour les moments de vie collective, mais aussi certaines activités nécessitant un faible effectif. Le grand groupe, lui, est composé de plusieurs petits groupes de tranche d’âge approchante.Il fonctionne surtout au moment des activités. Enfin, souvent associé aux deux situations précédentes, des moments où les enfants n’ont pas de groupe défini et se regroupent en fonction de leurs choix propres. Les activités qui suivent le réveil individuel en sont un bon exemple.

Une structure de vie qui s’appuie sur les réalités de l’enfant et respecte ses besoins

L’alternance de ces différentes situations de vie collective n’enferme pas l’enfant dans une structure hermétique mais permet de varier le cadre éducatif en fonction de ses besoins. Les enfants ont besoin de sécurité affective et de repères forts. Le petit groupe leur permet d’avoir un animateur de référence qui sera là pour tous les moments sensibles tels que le courrier, le coucher... Les enfants peuvent dire « Mon animateur, c’est lui ! » Ils savent qu’un adulte les a particulièrement en charge. S’il a un coup de blues, quelque chose qui ne va pas, il est là. Mais cette présence n’est ni fugace, ni trop prégnante et permet à chaque enfant de se situer.
« Mélanie aime bien son animateur, mais elle ne cherche pas vraiment à être plus avec lui qu’avec les autres. Ce qui lui importe surtout, c’est les copains et les copines. Paul quand à lui est plutôt inquiet et il se débrouille pour être toujours avec son animateur. Il se met à la même table, quand il y a des jeux dans le grand groupe ou des activités à choix, il n’est jamais loin de lui. » Mais cette situation n’est pas fermée et Paul pourra à tout moment s’éloigner de cet adulte de référence s’il le souhaite, tout comme Mélanie pourra s’en rapprocher si elle en ressent le besoin. Et les situations peuvent être différentes en fonction des enfants mais aussi du moment dans le séjour

Les enfants sont parfois tiraillées entre leur besoin d’activité et leur besoin de lien affectif : « J’veux être avec mon frère. »

L’alternance des situations leur permet de vivre en petit et grand groupe des activités en rapport avec leur tranche d’âge et leurs centres d’intérêt, mais également de pouvoir retrouver le frère, le cousin, ou le copain de l’immeuble à certains moments de la journée. Les groupes spontanés formés par les enfants dans la vie de tous les jours respectent les grandes tranches d’âges, mais sont rarement des groupes uniformes. Lorsque les enfants se retrouvent dans le quartier, dans la cours de récréation, il y a souvent un certain brassage. Le petit groupe permet d’être avec les enfants de son âge, le grand groupe élargi à une tranche d’âge (6-8 ans, 9-10 ans...) et certains moments de la journée permettent les regroupements en fonction de son choix. Mais, ces situations s’adaptent à la réalité des enfants. Certains vont avoir tendance à aller plutôt vers les plus grands ou à varier les copains avec lesquels ils jouent. D’autres vont chercher à se regrouper systématiquement entre aux. Tout cela évoluant au fil du déroulement du centre de vacances.

Le groupe, c’est vivre ensemble et bâtir des projets communs

Cette vie en collaboration avec les autres est une richesse, mais les enfants ont aussi parfois besoin de se retrouver seuls. Là encore, l’organisation de la vie collective va dans le sens du respect de chacun. L’alternance des différentes situations va permettre aux enfants de pouvoir s’isoler dans se mettre en marge du groupe ou s’y trouver en conflit. Lors des activités calmes ou des ateliers du réveil individuel, un enfant peut parfaitement s’il en a envie, jouer tout seul dans son coin, lire ou ne rien faire. Le cadre et les règles fixées lui offrent cette possibilité s’il le désire et ne le met pas en opposition à la vie du centre. Le fait d’être tantôt en petit groupe, tantôt en grand groupe va également permettre aux enfants de vivre des situations multiples et d’y trouver leur place.
Pierre va avoir plus de facilité à s’exprimer dans le petit groupe, il y sera plus à l’aise, osera d’avantage, se mettra plus en valeur. Le fait de pouvoir vivre régulièrement cette situation sécurisante au cours de la journée lui permettra d’être à l’aise et de se sentir bien dans la collectivité. Mais il n’y sera pas enfermé et aura l’occasion de vivre autre chose. Pour d’autres enfants la situation sera différente, mais chacun pourra être pris en compte en fonction de ce qu’il est.

Une structure de vie qui renforce le travail d’équipe des animateurs

Trois ou quatre animateurs travaillant au sein du même grand groupe vont pouvoir mettre en dynamique leurs complémentarités. Les membres de l’équipe ont des intérêts, des compétences différentes : un est passionné par le sport, un autre par le milieu naturel, le troisième aime la musique...
Ensemble, il vont devoir proposer et animer des activités diverses pour lesquelles ils ont des approches différentes.
Leurs expériences sont diverses, l’animateur peut-être stagiaire, vivant son premier séjour. Il peut déjà avoir encadré des centres de vacances, mais travailler pour la première fois avec tel groupe d’âge ou dans un environnement qu’il connaît mal. L’animateur peut également avoir de l’expérience et bien connaître les centre et les différents facteurs composant le séjour. Là encore, dans le cadre du grand groupe, ils vont devoir organiser et animer des activités et partager leurs expériences. Ces différences favorisent une logique de formation. L’animateur stagiaire va pouvoir bénéficier de l’expérience des autres. Celui qui a de l’expérience, qui a déjà encadré le centre va devoir justifier, expliquer, mettre des mots sur des pratiques. Parler de ce que l’on projette de faire, c’est casser en partie le fonctionnement sur l’habitude (« Je mets en place telle chose parce que l’année dernière, nous avons fait cela. »). Bien sûr l’animateur qui a de l’expérience peut vouloir l’imposer aux autres. Mais dans ces cas là, il portera le groupe tout seul et cette situation n’est jamais viable à long terme. Elle débouche rapidement sur le conflit. Quelques jours après le début du centre, lors de la réunion du soir, Thierry invective les autres animateurs du groupe : « Vous ne faites rien ! C’est moi qui suis obligé de tout diriger : En plus vous permettez aux enfants ce que je leur interdis ! » La réponse ne se fat pas attendre : « Tu veux tout régenter ! Tu organises tout dans ton coin ! Nous ne savons jamais ce qu’il faut faire ! »

Pour fonctionner correctement, le grand groupe impose aux animateurs une concertation et une prise en compte de chacun en fonction de son expérience.

Cette organisation permet aux animateurs d’être davantage à l’écoute des enfants. À l’écoute de leurs idées, de leurs projets, mais également de leurs difficultés. Ils connaissent plus particulièrement les enfants qui font partie de leur petit groupe, mais connaissent également bien les autres avec lesquels ils passent régulièrement du temps chaque jour.
Chaque animateur va percevoir la vie du groupe, les réflexions et les comportements des enfants avec son expérience et sa sensibilité. Cette multiplicité de points de vue va permettre une meilleure prise en compte de tous. Lors de la réunion du soir, le groupe d’animateurs va faire le bilan de sa journée avant de préparer les activités du lendemain.
Ce moment va leur permettre d’évoquer les évènements du jour, ce qui a plus ou déplu aux enfants, la manière dont ils se sont comportés, les souhaits qu’ils ont pu émettre. Mais il va également permettre de parler d’un enfant qui pose des problèmes dans le groupe.
Tous les animateurs ne le perçoivent pas de la même façon, ont des relations différentes avec lui. En fonction de cet ensemble, ils vont essayer de mettre en place des stratégies pour faire évoluer la situation.

Olivier Ivanoff, Les cahiers de l’Animation Vacances Loisirs n°34, CEMEA, 2ème trimestre 2001.

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